Vers une architecture frugale
> L2 : Construire
> S4 – « ambiances, énergie(s), gestion des ressources »
1. La transversalité
La mise en place des TD Transversaux correspond parfaitement à notre vision de l’enseignement du projet et la participation d’un ingénieur (diplômé architecte) permettra d’aborder la conception bioclimatique du projet; de même, le travail d’un architecte - informaticien permettra aux étudiants d’affiner leur compétences des logiciels comme Revit et Archicad.
L’organisation des TD se fera par 4h/quinzaine entre STA et ATR. Selon l’avancement du projet, les TD seront réalisés sous forme de cours, en TD à part et spécifique ou bien en atelier, lors des corrections.
2. Démarche de projet / L’épistémologie du plan
L’objectif de tout enseignement du projet est d’instaurer des situations opératives où les étudiants puissent comprendre, s’approprier et construire leur démarche de projet. Il s’agit d’un processus évolutif, qui s’élargit selon les thématiques, les échelles et de l’imbrication des “savoirs” dans le savoir-faire du projet.
Tout projet est une réponse à des programmatiques et des contextes concrets et complexes formulées par une maîtrise d’ouvrage publique ou privée. Les étudiants doivent comprendre d’emblée que le projet architectural et urbain est un cheminement qui passe par plusieurs étapes qui lui permettent de cerner les enjeux pour apporter des réponses. Ce premier niveau de l’approche correspond à la phase Analyse.
L’analyse s’appuie sur le travail de recherche, elle doit produire des concepts et accéder à un certain niveau d’abstraction. Des données brutes d’une programmatique, l’analyse doit prioriser les usages et les stratégies spatiales; des contextes bruts, l’analyse doit permettre de trouver le fil conducteur et les points qu’il faudrait appuyer pour qu’un lieu se transforme dans telle ou telle autre direction. C’est de l’analyse que proviennent l’intentionnalité et les images nécessaires au démarrage, à l’orientation du projet : le socle de la phase Esquisse.
La démarche de projet est le moment de la formalisation. Par le dessin, les intentions, les idées, les concepts se traduisent en volumes, élévations, coupes et plans. Les cheminements qui mènent à la formalisation des concepts sont variés, imprévisibles comme le sont les processus créatifs. La créativité, indispensable à l’architecte, ne suffit pas pour affirmer un projet. L’ensemble très large de visions du projet, travail de dessin décliné dans ses diverses formes d’expression, se confirme néanmoins, dans le plan.
C’est au niveau du travail du plan qui se « processent » les usages, les flux et les activités humaines auxquelles “in fine” le projet doit répondre. Le plan est le grand exercice de la démarche du projet : c’est “en plan” que les relations politiques et sociologiques s’expriment comme des jeux de stratégies d’espaces et d’affectations; c’est par lui que l’irrigation de l’édifice s’exprime et c’est par lui que les intentions “extérieures” , le volume, les perspectives, se confirment, ou pas.
En effet, en L2 il y a une véritable épistémologie du plan à faire appréhender par les étudiants : pourquoi adopter un parti “en peigne”, en “U” ou autour d’un “patio”? Pourquoi telle épaisseur de bâti pour le logement et telle autre au tertiaire, aux bureaux? L’apport de l’étude des typologies est important, tout comme celui des usages, des hiérarchies d’usage, des déplacements.
En fait tous les dessins sont indexés au plan et c’est par là que se fait le passage à la démarche constructive, des épaisseurs des murs, la mise en place des éléments porteurs, les parements, etc.
En L2, les étudiants peuvent se prendre en main et être déjà un peu autonomes s’ils comprennent qu’une démarche de projet est un travail solide sur l’espace et dans l’espace à partir d’un énoncé fondé par une analyse solide. Cet exercice du dessin,
de sa complexité et ses dérivations, est au cœur du savoir-faire de l’architecte. Cette capacité à dessiner des mouvements
et des choses invisibles, de les imaginer et de les représenter est un travail difficile, extrêmement difficile, tout autant que l’interprète qui oublie ses mains pour jouer une partition, ce que l’on doit éveiller chez l’étudiant est un besoin du même ordre : celui d’oublier le dessin pour ne dessiner que ce qu’il voit. C’est à ce moment-là qu’il peut faire un projet ressenti, quelle que soit la méthode, car il lui “ressemble”. Ce travail du dessin, avec de telles caractéristiques, est une formation à part entière,
qui ne s’apprend pas du jour au lendemain, qui exige une dimension didactique particulière : faire beaucoup de projets! C’est indispensable pour apprendre à faire du projet. C’est notre vision de l’expression “apprendre à faire du projet par du projet”.
3. Le projet global (holistique)
Le projet architectural et urbain n’est pas l’addition des parties qui le composent. Au contraire, l’œuvre d’architecture est une totalité et ses différentes composantes se combinent de façon singulière, dans une cohérence qui leur est propre et c’est cela-même qui donne du sens à l’architecture des bâtiments et des espaces urbains.
En S4 la relation étroite entre le projet, la construction et le numérique doit avoir pour objectif de fabriquer une forme de collaboration qui favorise la clarification des intentions exprimées par les étudiants.
La question serait alors comment les dispositions constructives, les dispositifs de gestion des ambiances et le choix des matériaux viendront épauler tel espace, et comment la maquette 3D deviendra, au bon moment, l’outil qui permettra de départager tel ou tel choix.
Les idées d’un projet sont souvent diverses et font l’objet d’occultations intellectuelles et visuelles. Le processus de conception est en fait le travail d’essayage des diverses hypothèses de combinatoires d’espaces et de formes. Les diverses occultations sont levées progressivement au fur et à mesure de l'avancement des différentes phases du projet. Lorsque les coupes, les élévations 'matchent' toutes avec le plan, lorsque cette cohérence touche une ligne de force prometteuse, lorsqu’elle nous fait dire le concept, on est dans l’expression.
Faire de la conception, au-delà de la méthode et des outils mis à disposition des étudiants, relève du passage des sensations premières au discours conscient. L’étudiant acquiert la capacité de s’exprimer lorsque sa pensée est parfaitement ancrée dans le langage verbal et le langage visuel.
Lorsque l’étudiant comprend et est en mesure de communiquer sa pensée à travers le construit, il est dans le projet, il est dans l’architecture. S’exprimer signifie ici toucher quelque chose de ressenti et de véritable, qui mérite le détour et le temps d’un débat. Faire de la conception, s’exprimer par le construit, signifie s’initier à cette science empirique qu’est le projet.
Les architectes et les équipes de concours appellent phase de la conception comme la “recherche”. Un bon sujet d’architecture est celui que l’on ne sait pas “à priori” par quel bout commencer. Certains architectes sont connus par les “brainstormings”, par des “retournements de situations”, des “modifications la veille d’un rendu”. L’approche de l’enseignement par le projet global est celle où le dévoilement de la démarche de projet se fait par le processus de conception.
Le projet global ne peut naître d’un concept déjà énoncé, au contraire la conception se confond avec le dévoilement du concept, de ce qui était obscur et vient vers la lumière.