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  • S8-P1

Projet S8

Semestre 8

DE 7 Praxis : Positions - P. Maillols, J. Broussart

Enseignant(s) : Philippe Maillols,Julien Broussart

  • Année : 4
  • Semestre : 8
  • Affilié à un groupe : non

Objectifs pédagogiques

Positions

Pour tout·e architecte, construire des édifices dans le monde contemporain pose un paradoxe. D’une part, il est indéniable que les modes actuels de production du bâti ne sont pas durables. Construire aujourd’hui revient à contribuer à l’exploitation des ressources terrestres et des énergies fossiles, participant ainsi à la destruction de la planète. D’autre part, refuser de construire reviendrait à abandonner cette responsabilité à d’autres acteurs, soumis à la seule loi du marché. Cela risquerait d’aggraver encore davantage la crise écologique.

Face à ce dilemme, notre position est claire : l’architecture est la seule discipline capable de formuler une critique interne de l’appareil productif. Le projet architectural doit être une opportunité pour concevoir une mise en œuvre soutenable sur les plans écologique, économique et social.

Dans cette optique, nous proposons d’étudier les qualités intrinsèques d’un matériau, en l’occurrence le bois, depuis son mode de production, ses caractéristiques ( légèreté, adaptabilité) jusqu’à sa mise en œuvre (type d’assemblage) dans un projet d’architecture. Chaque étudiant aura ainsi l’occasion, à travers son projet, d’explorer un thème spécifique en lien avec un territoire donné.

Pour ce semestre, les étudiants seront invités à interroger les conditions et les conséquences d’une hyperdensification, en concevant un bâtiment en bois à programmes mixtes sur un site parisien précis : une parcelle libre située le long du périphérique, à proximité de la rue Bruneseau dans le 13ᵉ arrondissement. Leur réflexion portera sur les dimensions techniques propres au matériau employé , programmatiques, politiques et économiques que soulève ce sujet.

L’hyperdensité ne sera pas envisagée comme une simple conséquence d’une uniformisation décontextualisée du territoire. Elle sera plutôt définie comme une opportunité de renouveau architectural et urbain, permettant l’élaboration de nouveaux systèmes organisationnels et une meilleure intégration des enjeux contemporains.

Contenu

Méthode et modalités de l’enseignement :

 

Comment, concrètement, engager une réflexion sur les rapports entre architecture et modes de production au sein des ENSA, et quoi cela peut-il constituer une pédagogie ?

 

Soulignons d’abord que l’architecture, comme l’ensemble des autres disciplines d’ailleurs, est nécessairement soumise aux conditions de production de son temps. On ne peut penser qu’à partir des structures intellectuelles propre à notre époque, et on ne peut construire qu’à partir des connaissances techniques et scientifiques de notre époque également. Cependant, et c’est là le point crucial, nous émettons l’hypothèse que l’architecture dispose de la capacité d’influer en retour sur ces mêmes structures et connaissances, c’est-à-dire sur l’appareil productif au sens large. À travers la puissance de sa matérialité, une architecture exprime autant une époque qu’elle construit les bases de l’époque suivante.

 

L’exemple le plus parlant de ce pouvoir transformateur, est sans doute la fameuse cuisine de Francfort, conçue en 1926 par Margarete Schütte-Lihotzky et Ernst May. Ce projet de standardisation du mobilier de cuisine, visait d’abord à en réduire le coût de fabrication et à améliorer l’efficacité des tâches ménagères. Nos cuisines contemporaines, à travers le monde, suivent désormais, dans leur immense majorité, les dimensions standards (60x60) définies par ce projet : clairement, l’ensemble de l’appareil de production industrielle de l’électroménager a été bouleversé et refaçonné durablement par un projet d’architecture.

 

Nous savons bien que le système productif contemporain soulève des enjeux urgents et majeurs : pour rappel, le secteur du bâtiment, en France, consomme 45% de l’énergie nationale, et est producteur de 25% des émissions de gaz à effet de serre. Au-delà de ce secteur, les effets de l’exploitation à outrance des ressources naturelles, du réchauffement climatique, des extinctions animales et végétales de masse, de l’explosion des inégalités économiques et sociales et désormais des risques pandémiques, pointent tous vers un même constat : notre système productif n’est pas viable, et il importe de le transformer. Pour quel nouveau système, c’est toute la question. Et c’est autour de cette question que notre pédagogie invite étudiantes et étudiants à réfléchir, à travailler et finalement à y apporter des éléments de réponse par le projet architectural.

 

De la même manière que des projets passés ont eu la capacité de transformer en profondeur le mode de production de leur époque, l’ambition de notre master est de construire sur le long terme, avec les étudiant·es, une collection de projets concrets et réalistes, s’ancrant dans les conditions actuelles, et dont la matérialisation disposerait potentiellement des mêmes capacités de remise en cause et de transformation du mode de production contemporain.

 

 

 

 

Calendrier :

 

Le semestre est divisé en trois temps :

- Un premier temps d’investigation du terrain d’étude commun à tout l’atelier, pour le repérage des sites potentiels d’intervention, l’analyse des édifices qui le constituent, et que l’on envisage de transformer, de compléter. Ce premier temps sera l’occasion d’un travail de relevé, en dessin et en maquette ; et de propositions de stratégies d’interventions à partir de la compréhension des existants.

- Un second temps d’expérimentation et d’élaboration du projet, pour inviter les étudiant.e.s à formuler et tester leurs intentions de projet, pour être à même de les interroger, et de les réajuster. Ce second temps privilégie la manipulation en maquette, le collage et le dessin.

- Enfin un troisième temps de développement et de finalisation du projet, pour l’approfondir et imaginer les principaux détails de mise en œuvre.

 

Chaque séquence se terminera par un rendu intermédiaire, où seront invitées des personnalités extérieures, afin de croiser les regards sur les projets des étudiant.e.s.

 

Les séances encadrées auront lieu le vendredi après-midi

Travaux

Travaux individuels ou en binômes selon le nombre d’étudiant.e.s inscrit.e.s

Documents graphiques, maquettes et textes

Livret de synthèse disponible deux jours avant le rendu intermédiaire et de fin de semestre

Présentation orale et argumentation

Bibliographie

Ouvrages

ALBERTI (Leon Battista), L’art d’édifier, Seuil, Paris, 2004. Texte traduit, présenté et annoté par CAYE (Pierre) et CHOAY (Françoise).

AURELI (Pier Vittorio), Less is enough. Strelka Press, Moscou, 2014.

BANHAM (Reyner), L’architecture de l’environnement bien tempéré, HYX, Orléans, 2011.

CHOAY Françoise, L’allégorie du patrimoine, Paris, Seuil, 1992

CHRIST Emanuel et GANTENBEIN Christoph, Typology II et III, Park books, 2012-2015

DARMON Olivier, Ré:Habiter. Réutiliser, Transformer, Expérimenter, Éditions Gallimard, Paris, 2021

DELLA CASA Francesco, La friche de la Belle de Mai, Actes Sud, l’Impensé, 2013

DEPLAZES Andrea, Construire l’architecture, du matériau brut à l’édifice, Birkhaüser, Berlin, 2008

FEVRE Anne-Marie, CASTANY Laurence, VAN HEEMS François, Le Channel, Actes Sud, janvier 2008

LUCAN Jacques, Composition, non-composition : Architecture et théories, XIX-XXe s., Lausanne, 2009

LUCAN Jacques, Précisions sur un état présent de l’architecture, PPUR, Lausanne, 2015

CORNOZ André, Le territoire comme palimpseste et autres essais, 1983

FROMONOT Françoise, « Manières de classer l’urbanisme », Criticat, n°8, 2011

KOOLHAAS Rem, « What ever happened to urbanism? », S, M, L, XL, 1994

MAROT Sébastien, L’art de la mémoire, le territoire et l’architecture, Éditions de la Villette, Paris, 2010

ROSSI Aldo, L’architecture de la ville, 1966

SECCHI Bernardo, Première leçon d’urbanisme, 2000