Des structures et des corps
Architecture et occupation
Réduit à sa plus simple expression, un projet d’architecture pourrait se résumer à ceci : une structure immobile occupée par des corps en mouvement. Aussi minimale qu’elle puisse paraître, cette définition soulève pourtant un certain nombre de questions épineuses ; quelle structure, avec quels matériaux et, par conséquent, pour quelle condition spatiale ? Comment l’édifier, selon quelles règles et suivant quels critères ? Pourquoi construire ceci plutôt que cela, à quelle fin, où et dans quel cadre ? Et puis qu’y faire, avec qui, avec quoi, quand, jusqu’à quand ?
Nous proposons d’aborder ces interrogations à travers l’exploration de deux principes structurels élémentaires : la construction filigrane et la construction massive. Toutes deux engagent une réflexion singulière sur la dialectique plein/vide : en construction filigrane, le projet se conçoit depuis les notions d’ossature, d’assemblage et d’articulation. En construction massive, le projet se conçoit depuis les notions d’inertie, d’appareillage (ou de coulage) et de percement. Bien qu’elles soient autonomes, ces deux logiques n’en sont pas moins complémentaires ; à travers une série de projets, nous tenterons de développer la richesse intrinsèque des mises en œuvre propres à chaque matériau, les potentialités spatiales qu’elles permettent, et les possibles usages qui en découlent.
Ce semestre est aussi l’occasion d’une réflexion collective sur la notion d’équipement. Définie a priori comme un édifice ouvert à toutes et tous, cette catégorie programmatique large interroge inévitablement les conditions politiques, économiques et sociales du commun : comment faire société, comment agencer notre quotidien, quelles règles minimales devons-nous établir pour vivre ensemble, quelles limites fixer aux libertés individuelles afin de garantir la plus grande liberté collective ? En d’autres termes, comment un projet d’architecture participe-t-il à l’organisation de notre société ?
Notre pédagogie propose aux étudiant·es d’aborder l’ensemble de ces questions avec la plus grande ouverture intellectuelle et formelle. Libres à elles et eux, à partir de cette dialectique entre forme et usage, de construire une réflexion singulière, autonome et critique. Notre ambition n’est pas de les conformer à une pensée et une pratique de l’architecture prédéterminée ; elle est, au contraire, de les accompagner dans une démarche personnelle visant à concevoir des alternatives désirables face aux logiques mortifères du monde contemporain.